Les inconvénients de l’énergie électrique photovoltaïque en Afrique

 

Nouvelle image (4)Compte tenu du milliard et demie d’habitants n’ayant pas accès à l’énergie électrique, nombreux sont les programmes nationaux et  internationaux qui militent en faveur de l’énergie pour tous. Ainsi, de l’extension du réseau électrique, au recours aux énergies nouvelles, l’énergie de demain doit répondre d’un gage de non intermittence,  d’accessibilité pour tous, et enfin de qualité.

Dans le précédent billet, nous avions évoqué les atouts de l’énergie photovoltaïque, qui constitue la ressource  énergétique la plus abondante au monde. Malgré qu’elle soit considérée comme l’enfant prodige des énergies nouvelles, son développement se heurte à des difficultés de tout genre que nous tâcherons d’évoquer dans ce dernier article.

En économie, l’une des principales variables d’ajustement est le prix. Au centre de la majorité des théories économiques, le prix  et les variations de prix symbolisent tout consentement à payer ou à recevoir, le changement de comportement par rapport à nos habitudes, et enfin notre capacité à adopter ou non une nouvelle technologie. De ce fait, quand bien même le coût de l’énergie photovoltaïque a chuté sur le plan mondial, les prix d’acquisition demeurent élevés pour la moyenne des ménages africains. L’installation solaire, qui est un investissement de long terme n’est pas souvent compatible avec les besoins financiers de court terme des populations. A titre d’exemple, un système de 400Wc qui permet d’alimenter la TV, 6 ampoules, la radio coûte environ 800 000FCFA HT[i], quand le SMIC est de l’ordre de 372 000FCFA/an/personne[ii], soit 744 000FCFA au moins pour un ménage où les deux parents sont actifs. La situation est d’autant plus grave qu’il n’existe pas de mécanisme de subventions, d’exonération fiscale, de prêts bancaires ou de soutien aux besoins de consommation des ménages.

Ensuite, l’énergie électrique pose le problème du stockage. L’énergie électrique ne se stocke guère, mis à part le recours à des barrages pour pomper l’eau en journée et la rétribuer  en soirée. Les énergies renouvelables sont pour la plupart intermittentes. Dans le cas du photovoltaïque, à la tombée de la nuit, le système devient totalement passif dans la mesure où il n’y a plus d’irradiation solaire, malgré que notre demande en énergie soit constante. La solution actuelle réside dans le recours au stockage sous forme de batteries, des piles géantes qui accumulent l’énergie non consommée durant la journée afin de la redistribuer le soir et les jours de faible ensoleillement. Malheureusement, la technologie des batteries n’est pas encore très avancée, dans la mesure où dans les pays développés, elle n’est pas souvent sollicitée (en Europe par exemple, on parle de raccordement au réseau or bien souvent dans les zones rurales africaines, on est en réseau isolé dit « Off Grid »).  Ainsi, le coût du stockage peut représenter jusqu’à 40%[iii] du montant initial de l’investissement, sachant que les batteries ont une durée de vie beaucoup plus réduite que les autres composants, avec un facteur risque en cas de court circuit ou d’erreur d’installation.

D’autre part, en l’absence d’organismes de conformité, de normes définies et appliquées, et d’un marché de consommation bien identifié, le secteur énergétique électrique en amont[iv] est peu identifié des grands  industriels mondiaux. La plupart des matériels utilisés sont  importés et utilisés sur la base de réglementations des pays exportateurs. Etant donné également que les réseaux présentent souvent des déviances (le cas des multiples baisses de tension, des surtensions, et des coupures non programmées), l’utilisation qui en découle devient impropre aux données d’utilisation du constructeur. Cette question va de paire avec le manque de compétence locale pour assurer le fonctionnement des installations, ce qui explique pourquoi la plupart des principaux projets solaires furent des échecs. Le rôle de la recherche et du développement, précédemment évoquée dans un article de TerangaWeb,  ainsi que de l’innovation pour un marché africain de consommation, compte tenu des ses particularités et de ses attentes devient alors un pilier phare du déploiement énergétique.

Enfin, un des principaux obstacles, ou du moins une ouverture de réflexion représente le duopole public-privé. L’énergie est un bien stratégique où la géopolitique  témoigne de l’importance des enjeux qui en découlent. Les investissements énergétiques sont très onéreux, et l’état actuel des réseaux et infrastructures dans les pays africains est synonyme des problèmes auxquels font et feront face les pays africains. L’implication du secteur privé s’avère donc nécessaire, pour dynamiser et pérenniser la filière, bien qu’à l’origine le secteur de l’énergie soit réputé pour être des plus monopolistiques. L’Etat, à mon avis se devra donc d’être un intermédiaire d’échange, régulateur et maitre d’œuvre des feuilles de route énergétique, en ayant toujours à l’esprit qu’économiquement non viable, l’énergie devra toujours être socialement disponible pour tous.

 

                                                                                                        Leomick SINSIN

 

 


[i] Il s’agit d’une moyenne recensée sur les installations au Bénin, et de mon retour d’expérience

 

 

 

 

 

[ii] 31000 FCFA (environ 48€) par mois

 

 

 

 

 

[iii] Revoir le précédent billet sur la décomposition du CAPEX d’une installation solaire

 

 

 

 

 

[iv] L’amont, tel que définit ici, concerne principalement les composants tels que les onduleurs, les régulateurs et les données de fréquence pour le réseau.

 

 

 

 

 

Les avantages de l’électricité solaire photovoltaïque en Afrique

L’engouement suscité par les énergies solaires, de nos jours témoigne du rôle et de la place que cette énergie occupe dans nos activités quotidiennes. Cet article présente les atouts de l’énergie photovoltaïque, enfant prodige des énergies renouvelables, dans le cadre de l'Afrique.


Quelle soit d’origine primaire ou secondaire, renouvelable ou non, chaque type d’énergie répond à un besoin bien précis en fonction de l’usage qui en découle et de son coût de fonctionnement. Dans les précédents articles[1], nous avons brossé un aperçu des différentes sources d’énergie électriques utilisées à savoir l’hydroélectricité, le thermique et l’énergie photovoltaïque. Dans cette étude, nous mettrons en exergue les atouts de l’énergie photovoltaïque dont le récent déploiement mondial en fait l’enfant prodige des énergies renouvelables.

En 2011, environ 27 GW de puissance photovoltaïque ont été installés à travers le monde (fig.1) ; soit le quart de la capacité totale de l’Afrique en 2008 et un peu plus que le tiers de la puissance de l’Afrique sub-saharienne[2](pdf). En conclusion d’un précédent billet, nous avions souligné que quand bien même l’énergie photovoltaïque ne résoudra pas entièrement le défi auquel fait et fera face l’Afrique ; elle aura toutefois un rôle clé à jouer dans le mix énergétique en matière de production d’électricité.

photovoltaic installation

fig.1 Installations photovoltaïques annuelles de 2000 à 2011 sources PV Report 2012

 

Avec un rayonnement variant de 3 à 6 kWh par m² selon la position géographique, le principal atout d’une installation solaire en Afrique est sa capacité à fournir suffisamment de puissance pour répondre aux besoins quotidiens. En effet, avec une consommation annuelle moyenne de 128 kWh[3] par individu en Afrique de l’ouest ; dont le coût d’installation reviendrait à environ 500 000 FCFA (environ 750 €) [4];  l’option d’un système photovoltaïque devient tout aussi bien accessible que rentable sur le long terme. Ce potentiel est nettement plus accru pour le solaire thermique dans les pays sahéliens où la forte température facilite la production de chaleur et/ou d’énergie électrique.

D’autre part, l’avantage d’un système solaire est la décentralisation du système de production. En effet, il est coutume d’isoler les systèmes traditionnels de production en dehors des zones résidentielles pour des raisons techniques (taille de l’installation, infrastructure lourde) et environnementales (sécurité). Cette longue distance fait entrer en compte des paramètres comme le transport et la distribution qui alourdissent le coût de revient de l’énergie produite. Outre cet aspect financier, les longues distances d’acheminement engendrent des pertes importantes entre le site de production et le lieu de consommation finale. A titre d’exemple, une nucléaire a un rendement de 30% malgré la puissance conséquente générée. Quand l’on connait la vétusté des infrastructures existantes, nul ne saurait contredire le bien fondé d’un système où le site de production juxtaposerait le point de consommation. Le bon exemple est la maison isolée avec des modules surplombant la toiture.

Enfin, le dernier argument et pas des moindres est le travail d’efficacité énergétique qu’impose une installation solaire. Un système solaire est une énergie intermittente qui dépend de plusieurs paramètres comme la météo, la qualité de l’installation etc. De ce fait, la consommation implique un recours vers des appareils sobres et peu énergivores. Nous réduisons ainsi le niveau de consommation tout en préservant le même niveau d’utilité. C’est le cas des ampoules LED de 5 W qui fournissent autant d’énergie que nos anciennes à  incandescence de 50 à 80 W.

Contrairement au réseau, le système photovoltaïque répond d’une installation statique au niveau de la production mais amovible dans le temps. La bonne gestion de notre consommation et le contrôle judicieux de l’appel en puissance permettent d’allonger considérablement la durée de vie de l’installation (10 ans avec stockage et environ 20 ans hors stockage) et de pérenniser l’indépendance énergétique par une offre individualisée adaptée à chaque ménage.

Sommes toute,  la valeur ajoutée de cet article consiste à mettre en avant les points positifs des installations photovoltaïques en site isolé. A nouveau, bien que l’énergie solaire ne puisse répondre à l’ensemble des besoins auxquels feront face les nations africaines pour les années à  venir ; son intégration simplifiée et souple aura une place prépondérante à jouer dans les mix énergétiques futurs. Dans un prochain billet, nous tâcherons d’évoquer les freins à la croissance de cette nouvelle forme d’énergie.


[1] http://terangaweb.com/cout-de-lenergie/

  http://terangaweb.com/lafrique-refuserait-telle-de-sauto-electrifier/

 

 

 

[2] L’électricité en Afrique ou le continent des paradoxes  Christine Heuraux – IFRI

 

 

 

[3] Idem

 

 

 

[4] De l’expérience de l’auteur dans le secteur